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"La culture est une résistance à la distraction" Pasolini

Avignon / 2016 - Entretien / Kirill Serebrennikov

Mieux vaut en rire !

Mieux vaut en rire ! - Critique sortie Avignon / 2016 Avignon La Fabrica
Crédit photo : Margarita Ivanova Légende photo : Kirill Serebrennikov

Festival d’Avignon / Les âmes mortes
D’après Gogol / Mise en scène Kirill Serebrennikov

Publié le 26 juin 2016 - N° 245

La combine est habile : acheter à petit prix les titres de propriété de paysans-serfs décédés mais existant encore au recensement de l’administration, pour les hypothéquer et en tirer bénéfice. Tel est le procédé qu’invente Tchitchikov, petit propriétaire terrien, pour faire fortune. Dans Les âmes mortes (1842), Gogol montre l’inertie qui transforme l’humain en pantin et paralyse toute évolution. Le metteur en scène russe Kirill Serebrennikov revient au Festival d’Avignon et nous livre sa vision de ce classique projeté dans la Russie d’aujourd’hui.

Vous portez pour la première fois à la scène un texte classique. Pourquoi Les Ames mortes de Gogol ?

Kirill Serebrennikov : Parce que c’est l’un des meilleurs romans au panthéon de l’immense littérature russe. Les textes de Gogol et les mythes qui les entourent, représentent l’un des phénomènes les plus intéressants de notre culture. Pour cela, il est difficile de passer à côté. Dans pratiquement aucune culture du monde, on ne trouve de littérature de cette qualité. Gogol est unique. Heureux ceux qui peuvent le lire dans l’original !

« Il s’agit d’un théâtre dans lequel l’élément essentiel est le jeu. »

A travers les mésaventures d’un escroc dans une province de l’Empire russe des années 1820, ce roman montre la médiocrité et la paresse qui gangrènent l’humain Quelle résonance entendez-vous avec notre époque ?

K. S. : Rien n’a fondamentalement changé depuis l’époque de Gogol. Les hommes, leurs caractères et leurs conditions d’existence restent les mêmes. Les personnages de Gogol ne sont pas typiquement russes, mais relèvent plutôt d’archétypes universels. Où que l’on se trouve sur la terre, on peut rencontrer des Tchitchikov, des Pliouchkine, des Nozdrov ou des Malinov ! Dans chaque culture ou chaque mentalité. Se moquer d’eux permet d’oublier un instant nos cauchemars et nos hantises…

Comment porter au plateau cette œuvre parsemée de ramifications et digressions ?

K. S. : J’ai conçu ce spectacle comme une fantaisie, une étude de théâtre physique. Je l’ai construit comme une partition musicale et plastique, que les comédiens doivent interpréter. Le cadre de la mise en scène est assez rigide, mais il leur reste cependant des zones d’improvisation. Ce théâtre ludique et physique exige des artistes un savoir-faire bien précis. Chacun de leurs gestes, tout comme chacune de mes mises en scène, existent à travers le paradigme de la psychologie. Même si Gogol n’est pas un auteur essentiellement psychologique, les relations entre les personnages et leur comportement correspondent à des éléments de psychologie. Mais il s’agit, bien entendu, d’un théâtre de carnaval, où les personnages changent de masques, d’un théâtre dans lequel l’élément essentiel est le jeu. Cela convient à l’intrigue, dans laquelle un arnaqueur essaye de rouler d’autres arnaqueurs qui le roulent à leur tour.

 

Entretien réalisé par Gwénola David

A propos de l'événement

Mieux vaut en rire !
du mercredi 20 juillet 2016 au samedi 23 juillet 2016
La Fabrica
55 Avenue Eisenhower, 84000 Avignon, France

à 15h. Tél : 04 90 14 14 14. Durée : 2h25. Spectacle en russe surtitré.

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