La Terrasse

"La culture est une résistance à la distraction" Pasolini

Théâtre - Critique

Lulu

Lulu - Critique sortie Théâtre Malakoff Théâtre 71
Lulu, dans une mise en scène de Paul Desveaux. Crédit : Christophe Raynaud de Lage

Théâtre 71 / de Frank Wedekind / mes Paul Desveaux

Publié le 20 décembre 2017 - N° 261

Dix-sept ans après avoir créé L’Eveil du printemps, en 2001, le metteur en scène Paul Desveaux revient à l’écriture de Frank Wedekind (1864-1918) avec Lulu. Sans parvenir à faire surgir les évidences de cette tragédie tumultueuse.

Elle aurait pu rester dans la misère, mener une tout autre existence si un homme ne l’avait entraînée sous sa coupe, bouleversant ainsi son destin. Lulu n’était qu’une enfant lorsqu’elle fit la connaissance de Schön, le jour où elle tenta de lui dérober sa montre. Mais plutôt que d’appeler la police, celui qui allait devenir son mentor – et son amant – l’a recueillie, nourrie, habillée, instruite. Il l’a façonnée à son goût avant, quelques années plus tard, de l’offrir en mariage à un autre. Passant de mains en mains, répondant aux élans de possession de nombreux hommes, Lulu porte en elle la complexité et l’ambivalence d’un personnage mythique. A la fois innocente et séductrice, femme-enfant et femme-fatale, cet être multiple renvoie à tous les débordements de la tragédie qui porte son prénom. Rien, dans cette œuvre foisonnante, ne peut s’envisager de façon simpliste ou univoque. Imbriquant fantasmes érotiques, manipulations du pouvoir et emprise de l’argent, Lulu (pièce ici présentée dans une traduction de Ruth Orthmann et Eloi Recoing) ne peut affirmer sa beauté vénéneuse qu’à travers l’évidence des paradoxes qui la composent.

Fantasmes érotiques, manipulations du pouvoir et emprise de l’argent

Cet équilibre instable, jouant de contradictions et de contrepoints permanents, est loin des accents démonstratifs qui se dégagent du spectacle présenté par Paul Desveaux. Interprétée par des comédiennes et comédiens souvent dans le surjeu (le rôle-titre est incarné par Anne Cressent), ainsi que par un voltigeur-acrobate (Jonas Leclere) et trois musiciens (à la guitare, aux percussions et aux claviers), cette version très charnelle, très expressive de l’œuvre de Frank Wedekind nous transporte dans un univers de cirque. Beaucoup d’intentions sont soulignées, appuyées, forcées, dans cette représentation qui donne une impression d’accumulation. Cette Lulu va dans tous les sens. Elle manque de simplicité. Aussi de vérité. La vérité de personnages qui pourraient nous raconter la férocité d’un monde. La vérité de situations à travers lesquelles pourrait s’exprimer la grâce équivoque de certains troubles humains. Mais tout cela échappe à une mise en scène qui ne fait, finalement, que tourner autour de son sujet. La proposition de Paul Desveaux parvient, à diverses occasions, à faire émerger une forme d’empathie. Mais reste hermétique aux fulgurances d’un parcours de vie hors du commun.

Manuel Piolat Soleymat

A propos de l'événement

Lulu
du mercredi 10 janvier 2018 au vendredi 19 janvier 2018
Théâtre 71
3 Place du 11 Novembre, 92240 Malakoff, France

Le mardi et le vendredi à 20h ; le mercredi, le jeudi et le samedi à 19h30, le dimanche à 16h. Spectacle vu lors de sa création au Centre dramatique national Normandie-Rouen, le 8 novembre 2017. Durée de la représentation : 3h30 avec entracte. Tél. : 01 55 48 91 00. www.theatre71.com.

 

 

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