La Terrasse

"La culture est une résistance à la distraction" Pasolini

Théâtre - Entretien

Lourdes

Lourdes - Critique sortie Théâtre Paris La Colline – Théâtre National
paul_toucang Crédit photo : DR

La Colline / texte et mes Paul Toucang

Publié le 27 mars 2017 - N° 253

Pour respecter le testament de son gourou, une communauté sectaire de jeunes adultes se rend en pèlerinage à Lourdes. Les idoles tremblent et vacillent ; Paul Toucang rit et fait rire.

« La pièce, au fond, parle de cela : la radicalisation du désir qui s’exprime en termes religieux. Et on rit ! »

 

Comment l’idée de cette pièce est-elle née ?

Paul Toucang : Le point de départ, c’est le réveillon 2015-2016. Je devais faire une randonnée dans les Pyrénées avec des copains et je suis arrivé par hasard à Lourdes, faute de trouver l’hébergement que je cherchais. A l’époque, j’expérimentais la prise de champignons hallucinogènes. Le soir du réveillon, je suis allé dans le sanctuaire de la Vierge et j’ai pris des champignons… J’ai fait un bad trip très marquant, sur une trame paranoïaque, avec l’impression que le monde était une mise en scène destinée à me faire accepter que j’étais un fantôme déjà mort…

Et ensuite ?

P.T. : Après, et bien… Ça allait mieux ! A l’époque, j’étais encore au Conservatoire. On nous proposait de proposer des idées. Je voulais écrire des portraits d’acteurs avec l’idée de convoquer ce mort qu’on porte en soi : mon expérience hallucinogène à Lourdes m’avait offert un premier matériau. J’ai récolté d’autres matériaux, par des entretiens, des improvisations, et mené une première session de travail avec mes camarades du Conservatoire. Eux-mêmes sont d’ailleurs allés à Lourdes pour y prendre des champignons. Indispensable ! Nous avons donc fait un deuxième voyage, pendant lequel j’ai refait mon bad trip… Voilà pour l’expérience initiale : ce trip sous contraintes.

Comment êtes-vous passé à l’écriture ?

P.T. : Le trip c’est un temps de fête, les corps vont là où ils veulent. Mais je voulais organiser cette expérience dans et par la création. Je me suis attaché à constituer une histoire hyper solide. J’ai imaginé celle d’une communauté sectaire, adepte d’une sorte de nouvelle religion de guérison. Le gourou, un ancien gynécologue, décède. Le public est accueilli à ses funérailles. Dans son testament, il recommande à quatre femmes de partir à Lourdes, lieu du mystère de sa révélation. Les sectes affirment toujours posséder des vérités plus vraies que la vérité commune. Gilbert, le gourou de cette histoire, est un personnage invisible, conçu sur le principe d’une grosse tête de carnaval, dont on ne comprend la cohérence psychologique et existentielle qu’à la fin. Les quatre filles partent donc à Lourdes, arrivent à l’hôtel Soubirous, qui est aussi un lieu de révélation. On est dans le lieu hystérique de Bernadette, et là, plein de nouveaux personnages arrivent.

Qu’interrogez-vous avec ce spectacle ? La foi ? Le pouvoir de l’invisible ?

P.T. : J’essaie surtout de comprendre le rapport que ceux de ma génération entretiennent avec tout ça. Je ne crois pas tellement au théâtre ; je ne lui voue aucun culte. Je suis allé voir des sectes, des pseudo sectes : ça m’intéressait de voir ces gens en quête d’aventure personnelle, de chercher à comprendre leur personnalité. Un mystère plus fort que le théâtre les guide et les anime, et c’est la violence de ce désir que je voulais explorer. La pièce, au fond, parle de cela : la radicalisation du désir qui s’exprime en termes religieux. Et on rit ! Même si c’est un rire noir…

Propos recueillis par Catherine Robert

A propos de l'événement

Lourdes
du mercredi 19 avril 2017 au samedi 13 mai 2017
La Colline – Théâtre National


15, rue Malte-Brun, 75020 Paris. Du 19 avril au 13 mai 2017. Du mercredi au samedi à 20h ; le mardi à 19h ; le dimanche à 16h. Tél. : 01 44 62 52 52.

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