La Terrasse

"La culture est une résistance à la distraction" Pasolini

Avignon / 2017 - Entretien / Olivier Py

L’obstination de la hauteur

L’obstination de la hauteur - Critique sortie Avignon / 2017 Avignon Festival d’Avignon

La Fabrica / Les Parisiens / texte et mes Olivier Py
Maison Jean-Vilar / Hamlet / d’après Shakespeare / mes Olivier Py

Publié le 25 juin 2017 - N° 256

Olivier Py poursuit son chemin avignonnais, dans la lumière d’été d’une manifestation qui ne saurait éclipser toutes les actions menées pendant l’année, sur un territoire qui, plus que jamais, se nourrit du festival.

 « Le festival est un grand lieu de la liberté de la parole. »

L’Etranger, de Baudelaire, en exergue de la programmation. Pourquoi ?

Olivier Py : J’avais envie d’un peu de poésie dans ce monde de brutes ! J’avais envie de la hauteur de ces nuages !

Le festival reste-t-il politique dans cet appel du poème ?

O. P. : Plus que jamais ! Le Festival d’Avignon a toujours eu une dimension politique ; et il a toujours la même : celle de la démocratisation culturelle, parce qu’il demeure l’expérimentation utopique d’une réunion de la société autour des objets spectaculaires. Le festival n’est pas seulement une liste de spectacles. Ce sont les spectateurs qui le disent. Il n’est pas seulement l’occasion de consommer des spectacles. On vient à Avignon pour vivre une expérience commune, prendre la parole, écouter : le festival est un grand lieu de la liberté de la parole. Voyez comment la pensée culturelle est absente des propositions politiques du moment. Le festival aborde chaque saison une grande diversité de sujets politiques.

Pourquoi mettre l’Afrique à l’honneur de cette édition ?

O. P. : On a choisi plus particulièrement l’Afrique sub-saharienne. Et encore faudrait-il parler des Afrique : ce sont des mondes très différents. Nous avons privilégié les femmes et des artistes peu connus, pour favoriser de nouvelles paroles ; mais tous les artistes, qu’ils soient chanteurs, chorégraphes, metteurs en scène ou auteurs ont en commun la question politique. Autre chose en commun : chacun invente une forme nouvelle, qui n’est pas la copie du théâtre occidental. Cet accueil de la culture étrangère fait, je crois, la spécificité culturelle française. Il n’y a qu’en France qu’on se passionne à ce point pour la culture des autres. Cette exception culturelle française la fait échapper à une conception identitaire de la culture. La manière qu’a la France de rayonner dans le monde, c’est d’accueillir le monde. Je le dis sans polémique, c’est une des forces de la vie culturelle en France.

Qui sont ces Parisiens que vous mettez en scène ?

O. P. : Des hommes et des femmes d’aujourd’hui, de toutes les générations, des artistes, des politiques et des prostitués. Les prostitués ne parlent que de politique, les politiques ne parlent que d’eux-mêmes, les artistes ne parlent que de la mort. Comment ces mondes se croisent-ils dans Paris, dans les ruines d’un monde politique qui a perdu tout sens et se vautre dans les intrigues de cour ? Qu’est-ce que Paris, est-ce cette forme de folie addictive et sordide ? Voilà ce que j’interroge…

Vous présentez aussi Hamlet, créé avec les détenus du Centre pénitentiaire du Pontet…

O. P. : Nous l’avons créé l’an dernier et avons été très heureux des représentations à la prison du Pontet, mais les spectateurs ne pouvaient pas entrer et les acteurs ne pouvaient pas sortir. Grâce à l’appui de l’administration pénitentiaire et des juges, nous allons pouvoir le jouer à la Maison Jean-Vilar. C’est une aventure humaine magnifique, menée avec des gens extraordinaires. La situation des prisonniers est tellement dure que le théâtre n’est pas, pour eux, seulement culturel : il est de l’ordre du vital.

Le travail à la prison du Pontet n’est qu’une partie du travail mené avec la population…

O. P. : Nous menons une action sociale très importante, en grande partie avec l’Education Nationale. On touche presque 10 000 enfants. La Fabrica les accueille dans l’année. Nous poursuivons notre jumelage avec le collège Anselme-Mathieu et travaillons avec beaucoup d’autres collèges et lycées. On a créé une webtélé avec les jeunes, et nous sommes très engagés aussi dans la vie économique locale. A Avignon, une personne sur quatre vit du festival : il faut le rappeler ! Progressivement, les choses évoluent. Nous avons mené beaucoup d’actions qui portent leurs fruits. Depuis quatre ans que nous les rencontrons, beaucoup d’élèves d’Anselme-Mathieu ont eu envie de travailler autour du monde du spectacle, du journalisme à la coiffure. Le Festival d’Avignon crée des vocations et change des destins !

 

Propos recueillis par Catherine Robert

A propos de l'événement

Les Parisiens / Hamlet
du samedi 8 juillet 2017 au samedi 22 juillet 2017
Festival d’Avignon
Avignon, France

Les Parisiens. La Fabrica. Du 8 au 15 juillet à 15h, relâche le 10. Durée : 3h30 avec entracte. Hamlet. Le 22 juillet à 15h à la Maison Jean-Vilar. Durée : 1h15. Tél. : 04 90 14 14 14.

 

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