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Théâtre - Entretien

La Vie est un songe

La Vie est un songe - Critique sortie Théâtre Paris Théâtre de la Tempête
Le metteur en scène Clément Poirée Crédit : DR

Théâtre de la Tempête / de Pedro Calderón de la Barca / mes Clément Poirée

Publié le 25 août 2017 - N° 257

Nommé à la direction du Théâtre de la Tempête en janvier dernier, le metteur en scène Clément Poirée ouvre la saison 2017/2018 avec La Vie est un songe de Pedro Calderón de la Barca. Une œuvre entre conte métaphysique et fable politique qui nous plonge dans un monde où la réalité n’est jamais sûre.

Vous venez de prendre la succession de Philippe Adrien à la tête du Théâtre de la Tempête. Comme abordez-vous cette nouvelle étape de votre parcours ?

Clément Poirée : Je l’aborde avec tous les doutes que l’on peut imaginer et, en même temps, avec beaucoup d’enthousiasme. Je n’ai jamais pensé diriger un autre lieu que celui-ci. Mon histoire d’homme de théâtre a commencé à la Tempête. C’est non seulement là que j’ai créé ma première mise en scène, en 2004, mais c’est aussi là que j’ai découvert le théâtre, en assistant à une création de Philippe Adrien. C’était Excédent de poids : insignifiant, amorphe de Werner Schwab, en 1999. Après le choc qu’a été pour moi ce spectacle, j’ai été engagé comme stagiaire à la mise en scène pour Le Roi Lear monté par Philippe Adrien l’année suivante. C’est donc à La Tempête que j’ai grandi au théâtre. Je me suis construit entre ces murs. Je connais intimement leurs caractéristiques, toutes leurs vertus…

 

Quelles sont-elles ?

Cl. P. : Le Théâtre de la Tempête, qui a la particularité d’être bâti sur le principe du partage de l’outil, revendique un rapport fort à la convivialité. Et même, je dirais, à l’amitié. Cette amitié concerne bien sûr les compagnies, qui viennent jouer des périodes assez longues ici, ce qui est pour nous une grande richesse, mais elle concerne aussi les spectateurs. C’est un lieu qui a une autre particularité, cette fois-ci géographique : il est situé au milieu des bois. On y fait donc un théâtre un peu différent, je crois, avec toute l’histoire que l’on connaît de la Cartoucherie.

 

« Je cherche à créer un théâtre qui soit le “périscope de l’âme”… »

 

 Comment pourriez-vous caractériser votre propre univers artistique ?

Cl. P. : Je crois que c’est un univers qui comporte toujours, quel que soit le sujet qui le traverse, un aspect de féérie. Ce qui revient à prendre une certaine distance avec le réel pour effectuer une plongée dans la fiction. Je me rends compte, aussi, avec le temps – car, finalement, on découvre peu à peu le théâtre que l’on fait, plutôt qu’on ne le prémédite… – que c’est fondamentalement un théâtre d’acteurs. Et un théâtre qui tourne autour de gestes, c’est-à-dire qui va à l’encontre de ce que l’on pourrait appeler un « théâtre vérité », un théâtre du réel. Je cherche plutôt à créer un théâtre qui soit le « périscope de l’âme », comme le disait Kafka à propos de la scène.

 

Ce qui nous amène directement à La Vie est un songe, que vous créez en ouverture de saison…

Cl. P. : Oui, c’est une fable merveilleuse, qui interroge la façon dont on s’extirpe de nos pulsions, de nos puissances, de nos forces, pour atteindre la civilisation. La Vie est un songe résonne très fortement aujourd’hui, dans notre époque de plus en plus désinhibée. Calderón parle de tout ce qu’il faut de renoncement pour échapper à son destin d’humain, un destin fait d’instincts, pour parvenir à s’inscrire dans la civilisation. C’est aussi un conte métaphysique sur la filiation, sur le passage à l’âge adulte, à la responsabilité, un conte qui met en place trois rêves successifs, contenus les uns dans les autres.

 

Pour donner corps à ce conte vous dites vouloir instaurer une « théâtralité en apesanteur ». Qu’est-ce que cette théâtralité implique du point de vue de la représentation ?

Cl. P. : Cette pièce a des côtés absolument démesurés. On a l’impression que Calderón ne se soucie pas des contraintes du plateau. Evidemment, ce qui m’intéresse, c’est de plonger dans cette fantasmagorie sans chercher à la raisonner. Ce qui revient à mettre le spectateur dans la position même du personnage principal, le prince Sigismond, qui ne sait plus ce qui est de l’ordre du rêve ou de la réalité.

Entretien réalisé par Manuel Piolat Soleymat

A propos de l'événement

La Vie est un songe
du vendredi 15 septembre 2017 au dimanche 22 octobre 2017
Théâtre de la Tempête
Route du Champ de Manoeuvre, 75012 Paris, France

Du mardi au samedi à 20h, le dimanche à 16h. Durée : 2h. Tél. : 01 43 28 36 36.

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