La Terrasse

"La culture est une résistance à la distraction" Pasolini

Théâtre - Entretien

La Vase

La Vase - Critique sortie Théâtre Paris Théâtre des Abbesses
Marguerite Bordat et Pierre Meunier. CR : Antoine Conjard

Théâtre des Abbesses / conception et mes de Marguerite Bordat et Pierre Meunier

Publié le 20 décembre 2017 - N° 261

Ils s’étaient rencontrés pour un mémorable Forbidden di sporgersi, Marguerite Bordat et Pierre Meunier se retrouvent pour un projet passionnant dont le personnage principal sera la vase…

Pourquoi La Vase ?

Pierre Meunier : Après s’être confronté à la dureté, aux cailloux, aux ressorts, à la tôle, on s’est laissé glisser vers une matière molle, visqueuse et attirante.

Marguerite Bordat : Vaseux est un terme péjoratif, comme beaucoup d’autres mots associés à la vase ou à la boue. Pourtant, on vient tous de là ! On a eu envie de se remettre dedans de manière presque animale, à rebours d’un monde où on nous apprend à rester bien nets.

Comment cela s’est-il passé ?

M.B : On a commencé par littéralement se plonger dans la vase en baie de Somme !

P.M : On veut faire un spectacle qui part des sensations, de formes d’éprouvé sensible et sensuel. On s’est donc immergé pour disparaître dans la vase, pour examiner s’il y avait vraiment matière à ouvrir un chantier théâtral sur cette matière, et si notre attirance, notre intérêt, pouvaient être partageables avec un public.

Avez-vous eu des échanges avec des scientifiques ?

P.M. : Oui, avec des scientifiques du groupe AMMACO, qui étudient les matériaux déconsidérés pour tenter de les ressusciter dans l’imaginaire des architectes. On a pu construire avec eux la base du spectacle, élaborer un échange sur les meilleures manières d’ouvrir la curiosité d’un public sur une matière dont tout nous éloigne. Parce que la vase est d’une richesse énorme, pouvant trouver écho dans les champs poétique, politique, social, sexuel. C’est une matière qui échappe à toute assignation définitive, entre le liquide et le solide, qui sort des cases dans une société qui cherche tout le temps à tout compartimenter.

 « La vase a une réelle dimension archaïque. » Marguerite Bordat 

 « C’est une matière qui échappe à toute assignation. » Pierre Meunier 

 Comment allez-vous amener la vase au plateau ?

M.B. : Le plateau ressemblera à notre atelier. Avec des bâches transparentes comme celles que nous avons utilisées pour protéger les murs, avec des grands contenants, une grande auge pour nourrir le bétail, et différentes machines qui seront invisibles en périphérie. Mais on entendra la circulation des fluides à travers les tuyaux, via une pompe péristaltique, une cocotte qui apporte la matière avec de l’air comprimé. Le problème, c’est que ça va lâcher, les tuyaux vont céder, la matière se rebelle et les cinq personnes au plateau tentent de la contenir.

P.M. : C’est aussi un projet plein d’humour, une expérience sensible à partager, sans message caché ou crypté comme parfois on aime à en chercher en France.

Qu’est-ce qui vous attire tant dans cette matière ?

P.M. : Entre autres, cet abandon possible dans une nouvelle réalité, quand la vase noie tout, confond tout dans une uniformité sculpturale. On glisse alors dans une autre dimension, poétique et visuelle.

M.B. : Nous aimons ce qu’elle nous fait découvrir de nous-mêmes. Comment elle nous conduit à nous réenvisager en tant qu’êtres humains, à aimer le monde qui nous entoure dans ce qu’il a de plus simple. La vase a une réelle dimension archaïque.

Propos recueillis par Eric Demey

A propos de l'événement

La Vase
du lundi 8 janvier 2018 au jeudi 18 janvier 2018
Théâtre des Abbesses
31 Rue des Abbesses, 75018 Paris-18E-Arrondissement, France

à 20h30, relâche le dimanche. Tel : 01 42 74 22 77.

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