Les danseurs ont besoin d’espace(s)

Où en est le chantier de la Briqueterie ?
Daniel Favier : Le chantier sera terminé en juin 2012 et la Briqueterie, voulue par le fondateur de la Biennale Michel Caserta,  sera inaugurée au moment de la prochaine biennale en mars 2013. D’ici là, nous avons initié des projets avec divers chorégraphes dont Pascale Houbin qui travaille avec des ouvriers de la briqueterie, sur les gestes de leurs métiers sans les outils. La structure, outil de travail pérenne, est conçue comme un lieu d’échanges entre artistes, professionnels et publics. Le soutien à la création trouve un aboutissement dans la Biennale internationale, qui essaime dans une vingtaine de villes, les Plateaux, journées professionnelles pour les jeunes artistes, et les Temps forts, qui irriguent la saison des théâtres partenaires. Certains CDC sont aujourd’hui en recherche de lieux. Les danseurs manquent cruellement d’espaces spécifiques pour la danse.

 « L’idée était de se constituer en réseau, de porter la danse au cœur des villes et des territoires. »

Comment caractérisez-vous les missions des CDC ?
D. F. : Ces missions s’inscrivent dans l’histoire de la décentralisation, à partir d’un concept proposé par Annie Bozzini en 1995 à Toulouse. Des structures anciennes comme les Hivernales, Danse à Lille, la Biennale de danse du Val-de-Marne, Art Danse à Dijon, Uzès danse, alors festival de la Nouvelle danse, avaient une activité antérieure dédiée à la danse, et six lieux ont demandé dans les années 2000 à être labélisés et à bénéficier de l’accueil studio alors octroyé aux CCN, afin de disposer d’un montant de coproduction et de soutien à la création conséquent. L’idée était de se constituer en réseau, de porter la danse au cœur des villes et des territoires, de soutenir la création et la diffusion de la danse, de développer la culture chorégraphique, chacun des projets demeurant original et singulier. Les CDC sont en partenariat avec des opéras, théâtres municipaux, scènes nationales, structures associatives, et parfois mettent en place des projets européens. La Briqueterie travaille avec une trentaine de partenaires, majoritairement dans le Val-de-Marne mais aussi en France et en Europe.

Comment sélectionnez-vous les projets que les CDC soutiennent ?
D. F. : Les compagnies sont proposées par les CDC, puis on vote. Chaque structure donne ensuite une part de coproduction, multipliée par dix cela devient important. Le projet choisi est ensuite diffusé dans tous les CDC. Ainsi, nous avons coproduit  Peeping Tom, Thomas Lebrun, David Wampach, Nelisiwe Xaba, Hélène Iratchet, Radhouane El Meddeb, Androphyne, et – dernière compagnie en date pour 2012 -, Ambra Senatore.

Quel regard portez-vous sur la création chorégraphique ?
D. F. : La création chorégraphique, diverse, ouverte et contrastée, propose des œuvres abstraites et minimalistes aussi bien que des œuvres empreintes de théâtralité. Les actions des CDC reflètent cette diversité en accompagnant les artistes, et par des actions de sensibilisation. Moins fondée qu’auparavant sur des principes et des certitudes, la danse s’ouvre à de multiples champs, et se soucie aussi du répertoire, de la reprise des œuvres, de la trace de son histoire. De nombreux chorégraphes s’intéressent à la transmission. Le rôle du corps se réaffirme aujourd’hui dans des pièces moins conceptuelles, et le travail de la danse questionne la place du corps dans la société. La création investit aussi l’espace public dans une dimension politique et participative qui prend en compte la relation aux habitants.

Propos recueillis par Agnès Santi