La Terrasse

"La culture est une résistance à la distraction" Pasolini

La musique Baroque en France

La scène baroque française en vingt disques essentiels

Une lueur dans la crise

Le baroque vend plus de disques que les autres répertoires de musique classique. Mais cette situation n’empêche pas certaines dérives.

Publié le 10 juillet 2008

La scène baroque française en vingt disques essentiels

Concertos d’Avison
Café Zimmermann
(Alpha, 2002)
 
Le pari du compositeur baroque anglais Charles Avison était osé : transcrire des sonates pour clavier de Scarlatti pour ensemble à cordes. Grâce au Café Zimmermann, ces pages méconnues retrouvent une vitalité incandescente. Sans jamais tomber dans des tics maniérés, l’ensemble exalte les contrastes de nuances, les couleurs de l’harmonie. Rarement les boyaux des cordes anciennes avaient sonné avec une âpreté aussi jouissive.
AP
 
Suites pour violoncelle 4, 5 et 6 de Bach
Pascal Monteilhet
(Zig-Zag Territoires, 2001)
 
Recommander une version des trois dernières Suites pour violoncelle de Bach dans une transcription pour… luth ‘ C’est Bach lui-même qui a arrangé la 5ème Suite pour cet instrument. Et surtout, Pascal Monteilhet apporte avec ses cordes pincées une poésie infinie. Son sens de la respiration, sa liberté du phrasé insufflent une fraîcheur gracieuse.
AP
 
Les Sonates du Rosaire de Biber
Alice Piérot et Les Veilleurs de Nuit
(Alpha, 2003)
 
La poésie intérieure du recueil de Biber est magnifiée par le violon pur mais jamais neutre d’Alice Piérot. On pourrait préférer un jeu plus extraverti mais on se laisse séduire par cette vision sincère et habitée. A ses côtés, le continuo des Veilleurs de Nuit lui offre un écrin sur mesure, tout en entrelacs nuancés.
AP
 
Je meurs sans mourir de Boesset
Le Poème harmonique, Vincent Dumestre
(Alpha, 2003)
 
Pendant les premières notes du disque, on se croirait presque dans un club de jazz. Puis luth et théorbe font leur entrée, comme inspirés par un Orient imaginaire. Enfin, l’expressivité et le sens du rythme des voix ne sont pas loin de certaines mélodies pop. Et pourtant, il s’agit d’un recueil de chansons Renaissance d’Anthoine Boesset ! On pourra parfois s’interroger sur l’« authenticité » du traitement musical. Mais une chose est sûre : cette musique sonne avec un éclat absolument irrésistible.
AP
 
Symphonie n°4 de Bruckner
Orchestre des Champs-Elysées, Philippe Herreweghe
(Harmonia Mundi, 2006)
 
« Comment atteindre le Ciel avec un train de marchandises » : ce commentaire de Paul Klee à propos de la musique de Bruckner est mis à mal par cette version de la Quatrième symphonie du compositeur autrichien. Guidé par un sens aigu de la rhétorique, Philippe Herreweghe illumine la polyphonie brucknérienne. Le mérite revient aussi en grande partie aux timbres transparents de l’Orchestre des Champs-Elysées (en particulier les cuivres, splendides).
AP
 
Tristes Déserts de Charpentier
Il Seminario Musicale, Gérard Lesne
(Zig-Zag Territoires, 2006)
 
Tour à tour émouvant et grivois, Gérard Lesne révèle toute la magie de l’écriture vocale de Charpentier. Son souci de l’intelligence du texte accompagne une émission toujours sensible. Et n’omettons pas la beauté sonore de son ensemble, Il Seminario Musicale, avec le clavecin idoine de Blandine Rannou.
AP
 
Tic toc choc de Couperin
Alexandre Tharaud
(Harmonia Mundi, 2007)
 
L’instinct musical d’Alexandre Tharaud trouve en Couperin un complice de choix. Quel sens du phrasé dans les Barricades mystérieuses, et quelle articulation brillante dans Tic-Toc-Choc ! L’esprit de Couperin est ici touché par la grâce.
AP
 
Grands Motets de Desmarets
le Concert Spirituel, Hervé Niquet
(Glossa, 2005)
 
C’est le faste de la musique sacrée française qui resplendit dans cet enregistrement. Hervé Niquet crée un rapport fusionnel avec son chœur et son orchestre, pris dans le même élan généreux. Ces motets de Desmarets sont à la fois terriens (avec la magnifique basse de cromorne) et divinement lumineux.
AP
 
Symphonies pour les Soupers du Roy de Delalande
La Simphonie du marais, Hugo Reyne,
(Harmonia Mundi, 1990)
 
Enregistrées en 1990, ces Symphonies pour le souper du Roy n’ont pas pris une ride. Toujours aussi festifs, ces concerts de trompettes sonnent avec majesté. Hugo Reyne sait insuffler à ses troupes l’esprit des réjouissances du Grand Siècle.
AP
 
 
De Lirium de Haydn
Ensemble baroque de Limoges, Christophe Coin
( La Borie, 2006)
 
Infatigable chercheur, le violoncelliste Christophe Coin redonne vie à deux instruments tombés dans l’oubli : la lyre organisée et le baryton. Les partitions de Haydn qui leur sont dédiées mettent en lumière les sonorités étranges de ces factures hybrides. Avec son Ensemble baroque de Limoges et le Quatuor Mosaïques, Christophe Coin montre combien le raffinement de l’écriture de Haydn n’a aucun secret pour lui.
AP
 
Acis et Galatée de Lully
Les Musiciens du Louvre, Marc Minkowski,
(Archiv, 1998)
 
Inspirée par l’un des plus célèbres récits des Métamorphoses d’Ovide, cette pastorale réussit à mêler l’émotion au divertissement. La direction de Marc Minkowski est particulièrement alerte, trouvant dès les premières mesures son mouvement naturel qu’elle ne quittera plus. Léger, et coloré, l’orchestre maintient une tension constante. Quant aux chanteurs, ils offrent une véritable leçon de phrasé – culminant dans l’air du 3e acte « Enfin j’ai dissipé la crainte ».
JGL
 
Symphonie n°4 et 5 de Mendelssohn,
La Chambre Philharmonique, Emmanuel Krivine
( Naïve, 2006)
 
Avec ses bois verts et ses cordes aériennes, la Symphonie italienne de Mendelssohn trouve sous la baguette d’Emmanuel Krivine une clarté insolente. Inspirée par Bach, la Symphonie Réformation évite ici tout pathos en développant un souffle noble et inspiré. La Chambre Philharmonique s’allie parfaitement à l’autorité passionnée d’Emmanuel Krivine.
JLC
 
Combattimento de Monteverdi
Le Concert d’Astrée, Emmanuelle Haïm
(Virgin, 2006)
 
Emmanuelle Haïm sait s’entourer des meilleurs chanteurs. Son Combattimento convoque en « guest star » Rolando Villazon. Le ténor, habitué au bel canto, met sa projection au service d’une lecture enflammée, trouvant des accents populaires aux mélodies monteverdiennes. A ses côtés, Patrizia Ciofi est tout simplement délicieuse, et Topi Lehtipuu séduit par sa finesse de style.
AP
 
Divine Hymns de Purcell
Les Arts florissants, William Christie,
(Virgin, 2007)
 
Le dernier album de William Christie donne à entendre de rares pages de Purcell. Depuis le clavecin et l’orgue, le fondateur des Arts florissants entraîne ses chanteurs vers des sommets d’expressivité. Il est alors difficile de ne pas être conquis par le legato zénithal de Paul Agnew.
AP
 
Sonates de Scarlatti
Pierre Hantaï
(Mirare, 2005)
 
Pierre Hantaï n’a pas son pareil pour exalter l’incroyable modernité des sonates de Scarlatti. Son jeu possède à la fois la liberté de l’improvisation et la rigueur de l’analyse. La sonorité corsée de son clavecin procure à l’auditeur une incroyable sensation de proximité avec l’instrument. Renversant !
AP
 
Magnificat d’Uppsala de Schütz
La chapelle Rhénane
(K617, 2006)
 
La foi luthérienne d’Heinrich Schütz est tout sauf ascétique. C’est ce que nous prouve Benoît Haller et sa Chapelle Rhénane dans cet enregistrement du Magnificat d’Uppsala. Les mélismes virtuoses des voix se mêlent parfaitement aux sonorités colorées des cornets et autres sacqueboutes.
AP
 
Sonates pour violoncelle de Vivaldi
Bruno Cocset et Les Basses réunies
(Alpha, 1999)
 
Le violoncelle de Bruno Cocset possède un grain de son à la fois profond et brillant. Impossible d’imaginer meilleure adéquation avec la musique de Vivaldi, dont Bruno Cocset trouve le ton juste, autant dans le naturel du cantabile que dans la vélocité des ornements.
AP
 
La Verità in cimento de Vivaldi
Ensemble Matheus
(Naïve, 2003)
 
Avec cet enregistrement, Jean-Christophe Spinosi entamait son parcours discographique dans l’œuvre lyrique de Vivaldi, qui devait apporter à l’ensemble Matheus sa reconnaissance. Sa direction tout en mouvements y est à l’évidence pour beaucoup : de cette œuvre, Jean-Christophe Spinosi fait un bouillonnement passionné d’émotions, à la tête d’un orchestre survolté, exploitant toutes les nuances de l’œuvre et servant de point d’appui à une distribution exemplaire.
JGL
 
Tragédiennes
Véronique Gens, Les Talens Lyriques, Christophe Rousset
(Virgin, 2006)
 
Quelle noblesse d’expression dans cet album consacré aux héroïnes tragiques des opéras baroque français. En privilégiant la clarté de la diction à l’emphase du discours, Véronique Gens rend justice à la puissance dramatique de ces airs. Les Talens lyriques offrent un soutien attentif, mais parfois trop neutre, à ce chant passionné, qui trouve son apothéose dans le célèbre Tristes apprêts de Rameau.
AP
 
Aria di bravura
Diana Damrau, Le Cercle de l’Harmonie, Jérémie Rohrer
(Virgin, 2007)
 
Au départ, cet album aurait dû être dirigé par Riccardo Muti. On ne peut s’empêcher de remarquer que la direction de Jérémie Rohrer se situe à l’opposé de celle du maestro italien. A une conception galante, polie du style classique, le jeune chef du Cercle de l’Harmonie préfère mettre en avant la théâtralité du rythme et la nervosité de l’articulation. En parfaite osmose avec Diana Damrau, qui fait montre d’un déterminisme vocal à couper le souffle, aussi bien dans les pages méconnues de Salieri que dans les airs célèbres de la Reine de la nuit.
JLC

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