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La musique Baroque en France

La Chine se met à la lutherie baroque

La Chine se met à la lutherie baroque - Critique sortie
Légende : Un violon baroque chinois est aujourd’hui vendu 1350 euros. Mention : DR.

Publié le 10 juillet 2008

La Chine se met à la lutherie baroque

Des fabricants chinois construisent des instruments à cordes d’après les modèles du XVIIIème siècle, vendus en France à des prix défiant toute concurrence. Un phénomène en pleine expansion.

A Paris, la Rue de Rome est connue pour ses luthiers d’exception, souvent issus de la célèbre Ecole de Mirecourt. Et pourtant, chez Guy Coquoz, l’une de ces adresses prestigieuses, sont mis en vente des violons baroques à… 1350 euros ! Un tarif dérisoire qui s’explique par le pays d’origine de ces instruments : la Chine. Cela fait cinq ans qu’une entreprise de Pékin s’est ainsi lancée dans la construction d’instruments anciens destinés quasi exclusivement à l’exportation. « Lorsque nous avons commencé à les commercialiser, nous en distribuions une trentaine. Aujourd’hui, c’est deux fois plus », nous dit Denis Husson, directeur de la firme alsacienne Sebim, distributeur exclusif en France. Si la production est de série, les instruments sont entièrement faits à la main. « Le coût horaire est tellement faible qu’ils n’ont pas besoin de mécaniser leur production », explique le luthier Guy Coquoz, avant de remarquer que « les fabricants chinois bénéficient de matières premières, comme le bois, à bas prix. L’érable, par exemple, est disponible en grande quantité. »
 
« Un son rond et puissant » sur le violon chinois
 
L’arrivée du Made in China dans le milieu baroque ne s’est pas faite sans heurt. Comment, pour ces musiciens « non-conformistes », accepter une intrusion aussi brutale de la mondialisation ‘ La violoniste Maximilienne Caravassilis, membre de nombreux ensembles baroques (La Grande Ecurie, Les Musiciens du Louvre…), joue sur un violon chinois depuis plus de deux ans. Elle se souvient : « Au début, je n’osais pas dire que c’était un chinois. Les puristes ne supportaient pas. D’ailleurs, pour certaines productions, on m’a même demandé de me procurer un autre violon. » Ces instruments « low-cost » seraient-ils musicalement limités ‘ Pour Guy Coquoz, « ils sont faciles à jouer, assez légers et rapides d’émission. Ils sont donc parfaits pour quelqu’un qui vient du moderne. » Maximilienne Caravassilis partage le même avis : « Le son est rond et puissant, c’est très bien pour l’orchestre. » Elle reconnaît toutefois que « pour jouer un concerto, ce n’est pas l’idéal, car le timbre est un peu brut, un peu vert ». L’emploi de ces instruments permet également aux musiciens de ne pas adapter maladroitement leurs violons ou violoncelles modernes en mode baroque. « Cela permet de démocratiser la pratique des instruments anciens », affirme Guy Coquoz. Aujourd’hui, la commercialisation de ces instruments suscite une certaine méfiance chez les artisans luthiers, confrontés à une concurrence jugée « déloyale ». Outre les distributeurs officiels, on trouve aussi des entremetteurs à la légalité douteuse. De passage en Chine, certains musiciens achètent en effet des instruments qu’ils mettent en vente, à leur retour en France, jusqu’à trois fois le prix initial. Une façon bien particulière de se rembourser le billet d’avion…

A. Pecqueur

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