La Terrasse

"La culture est une résistance à la distraction" Pasolini

La formation théâtrale en France

En dehors du moule institutionnel

En dehors du moule institutionnel - Critique sortie

Publié le 10 mars 2011

Issue du cours Florent, Dominique Blanc a échoué par trois fois au concours
d’entrée du Conservatoire National Supérieur d’Art Dramatique (CNSAD). Econduite
par l’institution, cette comédienne sensible et singulière a cependant été
repérée par Patrice Chéreau, qui lui fit faire ses débuts dans Peer Gynt
en 1981.


Comment expliquez-vous votre manque de réussite au CNSAD ?

Dominique Blanc : Je crois que je sortais trop du moule. Je possédais une
grande maladresse qui a été montrée du doigt. Chaque époque possède ses modes,
ses tendances, le théâtre ne fait pas exception à la règle. Je ne devais pas
entrer dans le cadre de ce que l’on attendait d’une jeune comédienne à l’époque.
Aujourd’hui, ce serait peut-être différent. Mais finalement, j’ai envie de dire
que cet échec a été la chance de ma vie, c’est ce qui m’a permis de rencontrer
Chéreau. D’ailleurs, François Florent, avec qui je préparais l’entrée au
conservatoire, m’a toujours dit que je serais refusée ! C’était un visionnaire.
En observant quelqu’un sur un plateau de théâtre, il imaginait immédiatement ce
qu’il allait devenir, ce qui lui convenait, l’endroit où il allait pouvoir se
révéler. Il s’agissait d’un professeur extrêmement attentif, très généreux.
C’est vraiment dommage qu’il ait cessé d’enseigner?

Pierre Romans a également été une rencontre importante dans votre parcours
d’apprentie comédienne?

D. B. : Plus qu’importante : essentielle, fondamentale. Je l’ai connu
lorsque je suis entré dans la classe libre qu’il dirigeait avec Francis Huster.
C’était un être majuscule, un immense professeur.

« Chaque individu possède des possibilités qu’il est beaucoup plus facile
de bloquer que de faire éclore.
 »

Il parvenait à fouiller au fond de chaque élève afin de l’amener à s’épanouir
de façon magistrale. C’est sans doute ça, un grand pédagogue : quelqu’un doué
d’un sens de l’observation hors norme qui parvient à percer à jour la personne
qu’il a en face de lui, à la voir dans toute sa densité, sa fragilité, sa force,
à envisager l’arc de tous ses atouts. Car chaque individu possède des
possibilités qu’il est beaucoup plus facile de bloquer que de faire éclore.
C’est en cela que la pédagogie théâtrale demande une grande humilité, une
capacité à toujours s’effacer pour aller vers l’élève, le prendre en compte dans
son entièreté et sa spécificité afin de lui donner confiance, de lui faire
comprendre que tout est possible, de l’aider à poser les fondations sur
lesquelles il pourra s’appuyer, s’élever tout au long de sa carrière.  

Quelles sont, selon vous, les qualités fondamentales que nécessite l’exercice
du métier d’acteur ?

D. B. : Bien sûr, une sensibilité gigantesque, une curiosité de l’autre
et du monde, une volonté d’apprendre, de rencontrer les metteurs en scène, les
autres comédiens, une très grande ouverture d’esprit. Toutes ses qualités, il
faut savoir les développer par rapport à sa propre singularité, à sa rareté, à
ce qui fait son unicité d’artiste et de comédien.

Entretien réalisé par Manuel Piolat Soleymat

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