La Terrasse

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Théâtre - Entretien

George Dandin, entre farce et drame humain

George Dandin, entre farce et drame humain - Critique sortie Théâtre Nanterre LA FORGE
Patrick Schmitt

La Forge / George Dandin / de Molière / mes Patrick Schmitt

Publié le 24 février 2015 - N° 230

Dans sa fabrique de théâtre qui a vu naître nombre de ses créations, Patrick Schmitt met en scène George Dandin,  où le mariage du paysan fortuné et de la noble demoiselle désargentée déclenche de cinglantes et amères aventures.  

Pourquoi avoir choisi de mettre en scène cette comédie cruelle de Molière ?

Patrick Schmitt : Parce que c’est une pièce qui cache son jeu ! D’une réplique à l’autre, on fait le grand écart entre le drame humain et la farce, sans savoir toujours très bien où l’on est, et il est très important de ne pas savoir, jusqu’aux rôles mêmes, qui doivent échapper aux acteurs ! Cette pièce diffère des autres en ceci qu’elle ne se partage pas entre le camp dit des bons et celui des méchants, où les personnages de bon sens usent de tous les stratagèmes pour faire renoncer les chefs de famille à leur égoïste plaisir, et où les enfants réalisent, pour clore, le mariage qu’ils espèrent. Ici, lorsque la pièce commence, le mariage entre George Dandin et Angélique est consommé. George Dandin se plaint de son alliance avec sa femme, qui – dit-il – se tient au-dessus de lui. A l’image de Molière et d’Armande Béjart, c’est l’histoire d’un couple qui se désagrège.

« A l’image de Molière et d’Armande Béjart, c’est l’histoire d’un couple qui se désagrège. »

Votre mise en scène est-elle ancrée dans le XVIIème siècle ?

P. S. : Avec Laurence Chapellier, la créatrice des costumes, nous voulions marquer le XVIIème siècle, parce qu’il nous semblait important de savoir d’où on partait, mais en bannissant absolument toute idée de baroque ou de reconstitution historique. Par ailleurs, nous ne souhaitions pas non plus épouser les costumes d’aujourd’hui à seule fin d’exprimer l’actualité de la pièce, donc nous avons fait selon notre choix et parti pris esthétique.

Est-ce une tragédie déguisée en comédie ?

P. S. : Pas exactement. En fait, dans George Dandin, on rit de l’infortune ou du désespoir de celui qui vit un drame, et presque tous les personnages sont concernés. Pour le dire familièrement, on est toujours le pauvre ou le con d’un autre ! Ce n’est qu’après avoir ri, qu’on se demande si on a bien fait, et c’est le piège que Molière tend au spectateur !

En quoi est-ce une pièce toujours d’actualité ?

P. S. : La pièce s’articule sur la fracture d’un couple, conséquence d’un mariage forcé. D’un côté, nous avons George Dandin, qui a “acheté“ sa femme. De l’autre, nous avons Angélique (et sa servante), qui, ayant subi toutes deux l’hégémonie et la loi des hommes (père, mari, amants) revendiquent le droit de vivre selon leurs choix.  Dandin réprouve la manière d’agir de son épouse, mais ne s’efforce pas non plus de la comprendre, ou d’intégrer le cercle de sa belle famille. Tout ce qu’il cherche, naïvement, pathétiquement, est que l’on reconnaisse son infortune. C’est cette “stagnation“, qui va de plus en plus l’isoler, avant de le précipiter dans le gouffre.

Propos recueillis par Agnès Santi

A propos de l'événement

George Dandin
du mercredi 18 mars 2015 au dimanche 12 avril 2015
LA FORGE
19 Rue des Anciennes Mairies, 92000 Nanterre, France

20h30, dimanche à 16h, relâche les lundis et mardis, et le 27 mars. Tél : 01 47 24 78 35.

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