La Terrasse

"La culture est une résistance à la distraction" Pasolini

Focus -252-Centre Chorégraphique National Malandain Ballet Biarritz

Un Ballet singulier, biarrot et sans frontières

Un Ballet singulier, biarrot et sans frontières - Critique sortie Danse
Thierry Malandain © M Logvinov

Entretien Thierry Malandain

Publié le 18 février 2017 - N° 252

Au fil de ses nombreuses chorégraphies, le Ballet a façonné son identité artistique exigeante et toujours sincère. Avec les 22 danseurs permanents de la troupe, Thierry Malandain crée cette saison Noé à Chaillot.  

Quelle place occupe votre Ballet au sein du paysage chorégraphique français ?

Thiery Malandain : Une place à part. Notre Ballet, qui répond aux mêmes missions que les dix-huit autres Centres Chorégraphiques Nationaux, est l’un des rares à être ainsi adossé à la danse classique. Je suis attaché à ce vocabulaire, tout en développant une écriture personnelle explorant d’autres directions. La France est le pays qui a inventé la danse classique, puis d’autres lieux s’en sont emparés. Cette danse est pour moi un legs, une source d’inspiration et de renouvellement. Aujourd’hui, les chorégraphes qui utilisent le vocabulaire classique sont peu nombreux en France. Dans les années 80, l’avènement de la nouvelle danse française a mis de côté à la fois la danse classique et la création à partir du langage classique. C’est une situation spécifique à la France, et ces choix ont eu une incidence directe sur la formation et le niveau des danseurs.

Quelles sont les spécificités de votre Ballet ?

T. M.: Nous formons une équipe soudée par une complicité de longue date, qui date de l’époque du Ballet Théâtre Français de Nancy, que j’ai quitté en 1986 avec huit danseurs afin de fonder ma compagnie, installée à Elancourt. Six font toujours partie de l’équipe actuelle, et notre directeur financier fut l’un des enfants touchés par une action de sensibilisation à Elancourt ! En général, les danseurs réalisent toute leur carrière chez nous. Il y a environ trois ans, une génération est partie et a été renouvelée. Chaque saison, nous donnons une centaine de représentations, dont environ un tiers à l’international. C’est un enjeu important car la moitié de nos ressources proviennent de fonds propres. Parallèlement, nous avons heureusement la chance d’avoir la confiance des tutelles publiques.

Biarritz est une ville d’une riche culture chorégraphique…

T. M. : Tout à fait ! Pour plusieurs raisons qui se conjuguent et se renforcent. La culture basque traditionnelle est ancrée dans la danse et la musique, et la danse est l’un des marqueurs de cette foisonnante culture. Et la ville bénéficie d’un rayonnement international et d’un passé chorégraphique important, dont témoignent par exemple les danses au Casino au XIXème siècle ou la présence du Grand Ballet du marquis de Cuevas, qui venait répéter et danser à Biarritz. Dans les années 1990, la municipalité a voulu renouer avec la danse en créant d’abord le Festival Le Temps d’Aimer, puis en accueillant une troupe à demeure, devenue en 1998 un CCN, né de la volonté conjointe de la ville et de l’Etat. Le pari a réussi ! Et nous développons aussi un axe transfrontalier très important à travers le Ballet T.

« Le sujet de Noé s’est imposé par sa puissance symbolique. »

Comment est né Noé, qui sera créé à Chaillot en mai prochain ?

T. M. : C’est la quatrième fois que nous venons à Chaillot, mais cette saison, Didier Deschamps (ndlr directeur de Chaillot, Théâtre National de la Danse) voulait inviter la compagnie pour une création. Le sujet de Noé s’est imposé par sa puissance symbolique. D’emblée j’ai écarté l’idée d’évoquer les animaux, et voulu créer à partir de la partition d’une messe. J’ai choisi la Messa di Gloria de Rossini et ses neuf mouvements inspirés, étrangement méconnue, dont j’apprécie la qualité quasi opératique. Tout commence par le meurtre de Caïn et Abel, événement inaugural qui annonce les malheurs du monde. A partir du mythe du déluge, j’ai imaginé une sorte de rituel où Noé et son épouse Emzara apparaissent comme de nouvelles figures d’Adam et Eve, qui entreprennent de repeupler l’humanité et réinventer une communauté. Si l’eau a entraîné la destruction, elle peut aussi signifier une possibilité de régénération, comme une seconde chance.

 

Focus réalisé par Agnès Santi

 

Malandain Ballet Biarritz, Centre Chorégraphique National, Gare du Midi, 23 avenue Foch, 64200 Biarritz. Tél : 05 59 24 67 19. Site : malandainballet.com

 

A propos de l'événement

Malandain Ballet Biarritz

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