La Terrasse

"La culture est une résistance à la distraction" Pasolini

Focus -258-Théâtre de Sartrouville et des Yvelines, Centre Dramatique National.

Insuffler une dynamique créatrice

Insuffler une dynamique créatrice - Critique sortie Théâtre Sartrouville Théâtre de Sartrouville et des Yvelines - Centre Dramatique National.
Sylvain Maurice © D. R.

Entretien / Sylvain Maurice

Publié le 24 septembre 2017 - N° 258

Avec un nouvel ensemble artistique au sein du théâtre,    Sylvain Maurice entame son second mandat à la tête du Théâtre de Sartrouville et des Yvelines, et présente deux créations.

Quels sont les axes forts de votre projet ?

Sylvain Maurice : Nous développons un projet de territoire et poursuivons notre mission de création théâtrale. Seul Centre Dramatique National situé en grande couronne, notre théâtre est très bien implanté dans son territoire. Grâce au festival Odyssée en Yvelines, dont nous célébrons la onzième édition et qui propose six créations originales pour la jeunesse, nous irriguons le département des Yvelines et nous déployons dorénavant dans d’autres départements. L’attention à l’enfance et la jeunesse à travers la création est un axe fort de notre projet. Après une première équipe accueillie pendant mon premier mandat, de 2013 à 2016, un nouvel ensemble artistique composé de Magali Mougel, Bérangère Vantusso, Olivier Balazuc et Simon Delattre nous a rejoints. Nous allons les accompagner pendant trois ans, et chacun de ces artistes proposera une création dans le cadre d’Odyssée en Yvelines en 2018. J’ai souhaité impliquer des auteurs et pas seulement des metteurs en scène, car la question de l’écriture me paraît essentielle. Magali et Olivier questionnent donc le théâtre à travers l’écriture, tandis que les metteurs en scène Bérangère et Simon utilisent la marionnette, à travers des approches et sensibilités artistiques très différentes. La marionnette implique de s’interroger sur la confrontation acteur/marionnette, sur la nécessité même du théâtre. Le théâtre fonctionne quand la parole est active ; qu’elle soit faite de mots ou pas. La question du langage théâtral et de ses signes me passionne. J’aime d’ailleurs souvent inclure de la musique dans mes mises en scène, je travaille beaucoup avec les oreilles, sur le rythme.

« Le théâtre fonctionne quand la parole est active. »

Quelles sont les créations que vous proposez ? 

S. M. : Après Réparer les vivants créé l’an dernier, je continue de me consacrer à l’adaptation de romans. Je crée La 7e Fonction du langaged’après le roman de Laurent Binet. J’ai beaucoup ri en le lisant, et j’ai immédiatement voulu le porter à la scène. A partir d’un fait réel, la mort de Roland Barthes qui, le 25 février 1980, fut renversé par une camionnette devant le Collège de France, l’auteur imagine un polar ludique et captivant dans le milieu des intellectuels de l’époque. Roland Barthes aurait en fait été assassiné parce qu’il détiendrait un pouvoir secret – la 7e fonction du langage. Un duo improbable – le flic Bayard, très à droite, et le jeune prof de lettres Simon Herzog, très à gauche – mène l’enquête, qui les conduit notamment jusqu’au mystérieux Logos-Club où se lancent de fameux défis d’éloquence. L’enquête révèle les jeux de pouvoir, démasque les tartuffes, sans posture de dénonciation, mais avec un humour percutant. Ecrit bien avant les récentes campagnes présidentielles américaine et française, le roman explore de manière très juste, à la fois drôle et profonde, des problématiques actuelles autour du pouvoir de la communication dans les mondes politique et intellectuel. Les trois acteurs –  Constance Larrieu, Pascal Martin-Granel, Manuel Vallade – sont entraînés dans un jeu de rôles : il faut qu’ils soient mis en danger, qu’ils usent du verbe pour nous ensorceler. Je mets en scène le roman comme un concours d’éloquence, en poussant la parole dans ses retranchements.

Et votre seconde création ?

S. M. : Elle se fonde sur une rencontre avec la compagnie de l’Oiseau-Mouche, qui réunit des comédiens en situation de handicap. C’est vraiment cette rencontre artistique très forte qui est à l’origine de la création. J’ai mis du temps à savoir quoi faire avec eux. Après avoir travaillé sur différentes œuvres, j’ai découvert grâce à Leslie Kaplan Charles Pennequin. Ce fut une grande claque ! Dans son Pamphlet contre la mort, il mêle de manière originale une dimension intime concernant sa propre vie et une dimension universelle à l’écoute du monde. A partir de cet ouvrage magnifique, nous avons réalisé un montage de textes, du nom d’un autre de ses écrits, Bibi. Son enfance près de Cambrai, la mort prématurée de son père, sa situation sociale de fils d’ouvrier assortie à sa passion des mots, son intérêt pour la musique et notamment les chanteurs populaires, tout cela constitue une matière de jeu extraordinaire. Entre numéros de cabaret et performance, les cinq comédiens de l’Oiseau-Mouche, à la fois atypiques et totalement ancrés dans le monde, prennent la parole et racontent des histoires. Cette pièce singulière, pleine de vitalité, est une manière de donner la parole à ceux qui ne l’ont pas, de dire qu’ils sont et que peut-être nous sommes tous un peu «bibi ».

Propos recueillis par Agnès Santi

A propos de l'événement

La 7e Fonction du langage / Bibi
du mercredi 8 novembre 2017 au mercredi 14 février 2018
Théâtre de Sartrouville et des Yvelines - Centre Dramatique National.
Place Jacques Brel, 78500 Sartrouville, France

La 7e Fonction du langage, du 8 au 25 novembre 2017. Dès 14 ans.

Bibi, du 7 au 14 février 2018. Dès 14 ans.

 

Tél. 01 30 86 77 79.

Site : www.theatre-sartrouville.com

 

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