Gaz, plaidoyer d’une mère damnée

« En réfléchissant à la guerre de 14, je me suis aperçu qu’il y avait un fossé entre la réalité – qui est toujours complexe et contradictoire – et la version historique qui en était donnée : c’est Gavrilo Princip, l’anarchiste serbe, qui a causé cette guerre. Quand on sait que les pays impliqués préparaient tous la guerre depuis vingt ans et que tout le monde attendait l’occasion de se lancer dans la bataille, on voit qu’il y a là beaucoup de simplification. Avec Tom Lanoye, qui a écrit le texte, nous nous sommes demandés sur quel sujet cette simplification opérait aujourd’hui, et nous avons pensé au terrorisme.

Au cœur de l’intime

Faire parler un terroriste directement devenait trop politiquement explicite. Avec la parole de la mère, les relations familiales s’entrecroisent avec la question du passage à l’acte, et la parole de la mère est forcément soumise au doute. Elle explique l’acte de son fils de plusieurs manières, par exemple qu’un terroriste peut être vu comme un héros selon le point de vue, ou encore en relatant l’influence des médias dans les constructions imaginaires de son fils. Et sa parole passe, parce qu’on a affaire à une mère qui cherche à se remettre de la mort de son enfant. On a confié le rôle à Viviane de Muynck, une actrice très réputée en Flandres, et l’on a appris qu’elle-même avait perdu trois ans plus tôt un enfant. La question du terrorisme se double donc d’une dimension familiale éminemment émouvante. »

Propos recueillis par Eric Demey