La Terrasse

"La culture est une résistance à la distraction" Pasolini

Théâtre - Critique

Erich von Stroheim

Erich von Stroheim - Critique sortie Théâtre Paris Salle Renaud-Barrault.
Crédit : Jean-Louis Fernandez Légende : Thomas Gonzalez et Emmanuelle Béart dans Erich von Stroheim, mis en scène par Stanislas Nordey.

Théâtre du Rond-Point / de Christophe Pellet / mes Stanislas Nordey

Publié le 27 mars 2017 - N° 253

Un homme, une femme, un jeune homme : de multiples possibilités d’unions, de partages et d’assujettissements. Après La Conférence, en 2011, Stanislas Nordey revient à l’écriture de Christophe Pellet avec Erich von Stroheim. Un spectacle à la puissance énigmatique, qui questionne l’isolement, la marginalité et le rapport à l’autre.

Comme souvent dans le théâtre de Stanislas Nordey, il y a les mots. Le texte qui nous parvient de manière quasi directe, sans artifice psychologique, dans une mise en relation instantanée des spectateur-rice-s et des comédien-ne-s. Il y a la densité de l’écriture, chargée de sa nature incandescente, de son pouvoir d’inspiration. Pourtant, dans Erich von Stroheim, c’est autre chose qui, immédiatement, marque de son empreinte les enjeux de la représentation. C’est un corps. Le corps nu du jeune acteur Thomas Gonzalez. De bout en bout du spectacle, il impose sa présence physique au sein d’une scénographie alliant dépouillement et monumentalité (signée Emmanuel Clolus). On est loin, dans cette mise en scène d’une grande intelligence, des recettes éculées qui dévêtissent certains interprètes pour provoquer les rires ou mettre à mal les pudeurs. La nudité que convoque ici Stanislas Nordey est ample, exigeante, agissante. Elle permet d’établir un contrepoint organique au mélange de sécheresse et de formalisme qui caractérisent le texte de Christophe Pellet.

 Entre stylisation et corporalité

Face à ce corps dont la nudité finit par sembler d’autant plus naturelle qu’elle ne fait jamais l’objet d’un regard différencié de la part des autres personnages, Emmanuelle Béart, elle, porte une robe noire à manches longues. Quant à Laurent Sauvage (qui joue en alternance avec Victor de Oliveira), il apparaît en jean et le torse nu. C’est donc à travers cette palette de présences plus ou moins charnelles, mais aussi de tonalités de jeu allant de l’expressivité à la distanciation, que se déclinent les multiples relations amoureuses reliant Elle (une femme d’affaires ambitieuse et autoritaire), L’Un (un acteur porno quadragénaire qui profite des derniers feux de sa beauté) et L’Autre (un jeune homme anticonformiste qui essaie de s’inventer une vie en dehors des normes de la société). Les questions de la relation à l’autre, de la solitude, des rapports de soumission et de domination, résonnent ici de façon à la fois belle et énigmatique. Stanislas Nordey trouve le point d’équilibre entre stylisation et corporalité. Son Erich von Stroheim regorge d’une puissance insolite. Il éclaire d’une lumière crue les troubles et les revers de l’existence.

 

Manuel Piolat Soleymat

A propos de l'événement

Erich von Stroheim
du mardi 25 avril 2017 au dimanche 21 mai 2017
Salle Renaud-Barrault.
2 Avenue Franklin Delano Roosevelt, 75008 Paris, France

Du 25 avril au 21 mai 2017 à 21h, le dimanche à 15h. Relâches les lundis ainsi que le 30 avril et le 2 mai. Spectacle vu au Théâtre National de Strasbourg le 14 février 2017. Durée de la représentation : 1h30. Tél. : 01 44 95 98 21. www.theatredurondpoint.fr.

x

Suivez-nous pour ne rien manquer sur le Théâtre

Inscrivez-vous à la newsletter

x
La newsletter de la  Terrasse

Abonnez-vous à la newsletter

Recevez notre sélection d'articles sur le Théâtre