CARMEN DE BIZET

L’événement de la saison à l’Opéra National de Paris est le retour de Carmen, l’œuvre lyrique la plus populaire auprès du grand public, dans un nouveau spectacle de Philippe Beaunesne. Celui-ci veut gommer l’aspect folklorique espagnol sans pour autant choquer le public. D’un point de vue musical, toutes les valeurs sûres ont été réunies. Le directeur musical Philippe Jordan dirige une distribution pas forcément inédite à Paris mais qui reprend les meilleurs éléments des spectacles les plus récents. La Micaëla de Genia Kühmeier est d’une plénitude rare dans un rôle qui demande une vaillance autant psychologique que vocale. Nikolai Schukoff n’est sans doute pas mécontent de chanter à nouveau Don José à Paris, après sa prestation époustouflante d’humanité au Châtelet en 2007 mais dans un décor plein de poussière qui l’avait incommodé. Dans le rôle court mais payant d’Escamillo s’impose le choix de Ludovic Tézier, à la prestance scénique et à la noblesse vocale évidentes. Le rôle-titre est d’abord interprété par la grande Anna Caterina Antonacci, peut-être la Carmen la plus distinguée et la plus viscérale à la fois. Elle passe ensuite le relais à Karine Deshayes, pour une prise de rôle qui remet du piquant au milieu de la longue série de représentations qui affiche déjà complet. Guetter chaque soir les quelques places que l’Opéra conserve pour le jour même est alors indispensable car il n’est pas sûr que l’on retrouvera un plateau d’une telle qualité dans une œuvre si facile à aimer mais si difficile à interpréter.

A.T. Nguyen