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Théâtre - Critique

Avenir radieux, une fission française

Avenir radieux, une fission française - Critique sortie Théâtre
© Un Pas de Côté/Erwan Temple Légende : Nicolas Lambert interprète une vingtaine de rôles avec maîtrise et fluidité.

Publié le 10 décembre 2011 - N° 193

Seul en scène, Nicolas Lambert poursuit son œuvre de théâtre-documentaire, éveilleur de conscience, en éclairant l’histoire et le développement du nucléaire en France.

Deuxième volet de la trilogie Bleu-Blanc-Rouge – l’a-démocratie signée Nicolas Lambert, Avenir radieux, une fission française, fait suite au succès considérable de Elf, la pompe Afrique, qui éclairait la politique néo-coloniale de la France à travers le procès des dirigeants d’Elf. Après le pétrole, le nucléaire – 4% de l’énergie mondiale – : Nicolas Lambert braque le projecteur de sa conscience citoyenne sur l’histoire et le développement du nucléaire en France, si solidement implanté qu’aucune contestation n’est parvenue jusqu’ici à questionner son bien-fondé. « Il s’agit ici d’explorer le discours officiel du pouvoir, et la confiscation de la possibilité de débattre ». Monsieur Lambert n’est pas du genre à s’accommoder de l’ignorance et de l’incertitude, et à cet égard, vous méditerez comme nous l’édifiant extrait du rapport n°151 (1958) de l’Organisation Mondiale de la Santé sur l’énergie atomique, hautement révélateur, que vous découvrirez lors du spectacle. Comment la scène peut-elle se saisir d’un sujet aussi vaste ? Un défi de taille… Aucun procès ici ne constitue un point de départ à l’entreprise théâtrale, et plusieurs facettes complémentaires structurent la pièce : la question de l’Histoire, se déployant à travers les discours officiels et les faits plus ou moins occultes (largement évoquée, peut-être un peu trop), celle de la gestion de l’information ou de la non-information sur ce sujet sensible, celle de l’indépendance énergétique, et celle évidemment de la construction et maintenance des réacteurs et de la sécurité, 25 ans après la catastrophe de Tchernobyl (pauvres invisibles intervenant en sous-traitance)…

Incurie des responsables politiques

Nicolas Lambert a écrit son spectacle entre janvier 2010 et mars 2011 (cela n’aura échappé à personne que ce mois de mars évoque évidemment la terrifiante tragédie de Fukushima). Le metteur en scène et acteur, interprétant une vingtaine de rôles avec maîtrise et fluidité (dont notre Président, avec effet comique garanti) s’appuie sur des faits et chiffres vérifiés, il passe ainsi du débat public concernant le projet d’un nouveau réacteur EPR à Penly en Seine-Maritime en 2010, à des épisodes historiques mettant notamment en lumière un personnage de l’ombre, Pierre Guillaumat, administrateur du Commissariat à l’Energie Atomique de 1951 à 1958. L’incurie ou le cynisme des responsables politiques, le mythe de l’indépendance énergétique, la façade bien pratique des débats publics, le poids de la pub Areva et EDF dans le fonctionnement des médias, etc. Une foule d’informations nous parvient, de façon parfois trop foisonnante et éparpillée – on aurait presque envie que l’écran, plutôt sous-utilisé, serve de source d’information factuelle supplémentaire. A l’heure où le nucléaire se trouve sous les feux des projecteurs, les spectacles de Nicolas Lambert devraient en tout cas passer à la télévision.

Agnès Santi


Avenir radieux, une fission française, de et avec Nicolas Lambert, du 17 novembre au 17 décembre, du jeudi au samedi à 20h, dimanche à 15h, au Grand Parquet, 20bis rue du Département, 75018 Paris. Tél : 01 40 05 01 50. Durée : 2h. Tournée jusqu’en mai 2012.

A propos de l'événement


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