La Terrasse

"La culture est une résistance à la distraction" Pasolini

Théâtre - Critique

Aimer si fort

Aimer si fort - Critique sortie Théâtre Aubusson Théâtre Jean Lurçat
Angélica Liddell à la mode brique et charbon du Nord. CR : Jérémie Bernaert

Région / Aubusson / de Angélica Liddell / mes Guy Alloucherie

Publié le 26 novembre 2013 - N° 215

Spectacle mêlant danse, théâtre, performance et cirque, Aimer si fort, créé à Douai, reprend la trame de La casa de la fuerza d’Angélica Liddell. Une œuvre de prolongement, de cousinage, originale et fort bienvenue, pour que l’onde de la beauté ne cesse de se propager.

Il y a deux ans au Festival d’Avignon, La casa de la fuerza d’Angélica Liddell envoutait le public du cloître des Carmes. Forme performative de plus de cinq heures qui déroulait dans la nuit une déchirante plainte autour de la violence masculine et amoureuse, le spectacle ravissait par sa beauté singulière. Une beauté tellement liée à la personnalité d’Angélica Liddell – et à une écriture largement autobiographique – que le pari d’adaptation de Guy Alloucherie pourrait paraître insensé. Le metteur en scène dit avoir perçu Angélica Liddell « comme une sœur, la sœur qui est en lui » et a décidé de reprendre en partie le texte initial de son spectacle, tout en y mêlant les réactions de sa troupe et la façon dont le texte de Liddell l’a traversée. Avec Aimer si fort il donne donc à découvrir l’œuvre de Liddell autant qu’il en travaille la réception. Reprenant des éléments scénographiques du spectacle de l’espagnole atrabilaire, il y imprime sa patte faite de simplicité et d’humanité, de mélange des genres et des arts pour un spectacle où l’hommage ne nuit en rien à la créativité.

Poésie éruptive

Devant Aimer si fort, le spectateur ayant vu l’œuvre princeps se réjouit des clins d’œil et résonnances avec la mise en scène de Liddell, tandis que le “néophyte“ découvre à la fois l’œuvre et sa source. Au propos intime porté par l’histoire personnelle d’Angélica Liddell se mêle la violence faite aux femmes que cristallisent ces viols et meurtres en série commis dans la ville de Ciudad Juarez au nord du Mexique. Tour à tour, sur scène, neuf femmes deviennent de potentielles Liddell qui crachent cette violence intérieure que l’artiste espagnole sait si bien métamorphoser en poésie éruptive. Elles ne le font pas par imitation mais par appropriation, littéralement par l’incorporation de cette œuvre. Avec deux hommes, ces femmes prolongent ainsi l’utopique chaîne sororale esquissée par l’artiste espagnole. Au milieu d’elles, Nadia, au débit heurté, qui ne parvient à marcher que dans un équilibre précaire, physiquement abîmée, porte à la fois la réalité et la théâtralité du propos. Cette mise en scène prouve le talent de Guy Alloucherie qui depuis longtemps et encore une fois inscrit profondément le théâtre dans la vie.

Eric Demey

A propos de l'événement

Aimer si fort
du jeudi 19 décembre 2013 au mercredi 26 mars 2014
Théâtre Jean Lurçat
16 Avenue des Lissiers. 23200 Aubusson.

Le 19 décembre à 20h30. Tél : 05 55 83 09 09. Le 31 janvier au Fanal, 33bd Victor Hugo. 44600 Saint-Nazaire. Tél : 02 40 22 91 36. Les 25 et 26 mars à l’Agora, allée de l’Agora, 91000 Evry. Tél : 01 60 91 N65 65. Durée 2h.
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